Monday, October 01, 2001

La poupée russe de rêve




La poupée russe de rêve
Oui, bien sûr, cela arrive!
Au réveil ou, plus souvent, dans le courant de la journée, je me rappelle soudain du rêve que j'ai fait la nuit dernière. Par grosses bouffées, des détails de plus en plus précis me reviennent à l'esprit.
Je suis alors capable de décrire mon rêve, avec tout ce qu'il peut contenir d'étrange ...
J'y ai vu des formes, des couleurs, des personnages connus ou inconnus.
J'ai entendu des sons, des paroles, des bruits.
J'ai touché des objets, des êtres, des créatures.
Plus rarement, des odeurs m'ont assailli ou j'ai pu goûter parfois divers aliments.
Je me souviens maintenant parfaitement que l'un ou plusieurs de mes cinq sens ont été sollicités.
Je me souviens des situations vécues dans mes rêves.
Il y avait une histoire, un fil conducteur, souvent bizarre, si bizarre ...
J'y ai souffert, aimé, haï.
J'ai parfois été terrorisé!
J'y ai même tenu des raisonnements.
Maintenant, je suis réveillé, parfaitement réveillé.
En suis-je si sûr ?
Je sais que mes rêves n'étaient que des rêves, ce n'était donc pas la réalité.
J'en suis soulagé s'ils n'étaient pas agréables.
S'il s'agissait de cauchemars, je crains la nuit prochaine : ne se renouvelleront-t-ils pas ?
S'ils étaient agréables, très agréables, je regrette soudain que ce ne furent que des rêves, peut-être les retrouverai-je ce soir?
Mais revenons à mon rêve de la nuit dernière: je dormais et pourtant une histoire bien précise s'y déroulait avec ma participation, active ou passive. A l'intérieur de mon rêve, pas un seul instant je n'ai pu imaginer qu'il ne s'agissait pas de la vie réelle puisque mes cinq sens fonctionnaient parfaitement.
A l'intérieur de mon rêve, je ne pouvais donc pas savoir que je rêvais.
Dans mon rêve, on m'a même peut-être pincé !
Je ne me suis pas réveillé pour autant.
"Pince-moi pour être sûr que je ne rêve pas" ...
Or qu'est-ce qui me relie au monde extérieur réel si ce ne sont mes cinq sens: la vue, l'odorat, le goût, l'ouïe et le toucher ?
Et pourtant, pendant mes rêves, j'ai vu, senti, goûté, entendu et touché.
Alors?
Alors, c'est simple : plus rien ne me prouve que la vie réelle n'est pas qu'un rêve parmi les autres rêves ...
Et surtout plus rien ne me prouve que la vraie vie que j'aborde à mon réveil n'est pas également un autre rêve qui commence …
Plus rien ne distingue le rêve de la réalité, plus rien ne distingue la réalité du rêve.
Tout ce que j'ai cru vivre dans ma vie réelle n'était donc qu'une succession de rêves.
J'ai tout imaginé, tout inventé: les objets, les êtres vivants, les situations, tout ce que mes cinq sens m'ont permis d'appréhender.
Mes souvenirs, ma famille, mon environnement, mon chien, ma télévision, tout ce qui se passe de par le Monde, j'ai tout rêvé, j'ai tout imaginé.
Les arbres, la mort, les montagnes, les pommes de terre, mon chef, la politique, les hommes, les bêtes, les journaux, mon lit, la parole, les guerres, les livres, les
religions, les langues, le cosmos, la naissance, ... tout !
Rien n'existe depuis le début, d'ailleurs quel début?
Je me réveille d'un rêve pour entrer dans un autre. Je rêve que je rêve.
Plus rien ne démontre mon existence, ni celles des autres, objets et êtres animés ou inanimés.
Je suis une poupée russe du rêve, un anneau de Moebius dans un univers inexistant.
Et penser ne me prouvera pas plus que j'existe puisque je pense déjà dans mes rêves.
Descartes, au secours!
Alors, suis-je inexistant? Ou suis-je seul et si oui, où, dans quel univers?
Ou est-ce l'autre que je vois et que j'entends qui est seul au monde parce que je n'existe pas?
Suis-je une imagination de l'autre?
Ou bien vais-je me réveiller de toute ma vie qui ne fut qu'une succession de rêves du plus loin que je m'en souvienne ?
Et si oui, dans quel monde vais-je débarquer?
Et y serai-je seul?

7 comments:

  1. Anonymous9:48 AM

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  2. Mille pardons à la personne à qui j'ai volé ce texte!

    Merci à elle, mais je ne me souviens plus où je l'ai trouvé dans l'océan empli de cadavres et souvenirs flottants du Web.

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  3. Anonymous1:12 PM

    Si ces rêves se renferment en nous, c'est peut-être parce qu'ils ne peuvent plus s'exprimer en dehors de nous.

    Nos rêves, nous les partagions les uns et les autres. Mais depuis quelque temps, cela n'est plus possible. Pourtant, ce ne sont pas nos rêves qui ont disparu, mais seulement l'endroit où nous pouvions les disposer.

    Alors, nos rêves s'accumulent en nous: espoirs, fantasmes, haines, désirs secrets, frivololités inconscientes... Chaque nuit qui passent, nos rêves nous emplissent, car ne pouvant aller autre part. Nous essayons de les maîtriser, mais le trop plein fini par nous submerger. Telle la vague qui nous fais boire la tasse, nous nous noyons dans notre océan personnel de songeries, incapable dès lors de faire la différence entre la réalité et le rêve.

    Dès lors, chaque jour qui passe voit notre calvaire continuer: nous continuons de rêver et nos rêves s'insinuent un peu plus dans notre perception de la réalité, la déformant sans cesse. Parfois, nous arrivons à reprendre le contrôle sur nos fantasmes et parfois, ce sont eux qui nous dominent, quand notre esprit préfère les suivre plutôt que de faire face à la réalité.

    J'appelle ce phénomène celui de schizomorphénie. Tel le schizophrène, nous voulons à la fois sortir du rêve et continuer en même temps à le vivre. Avant, ces angoisses et espoirs se perdaient dans l'océan de l'inconscient collectif; maintenant, ils se terrent en nous, nous plongeons dans nos hallucinations propres.

    Comment en sortir, si tenter que nous le voulions? Arrêter cet état peut se faire de deux manières: ou bien nous (re)trouvons -ou construisons- un nouvel endroit où notre trop plein de songes pourra se déverser à nouveau et se disperser dans plus qu'un seul individu (dans l'idéal, dans toute l'humanité, comme avant), ou bien nous trouvons un moyen d'arrêter de rêver définitivement.

    Mais cette dernière solution, nous savons tous que cela revient à devenir une sorte de mort-vivant, sans âme et sans conscience, incapable de se rendre compte qu'il existe...

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  4. Anonymous12:00 PM

    Comment en sortir, si tenter que nous le voulions? Arrêter cet état peut se faire de deux manières: ou bien nous (re)trouvons -ou construisons- un nouvel endroit où notre trop plein de songes pourra se déverser à nouveau et se disperser dans plus qu'un seul individu (dans l'idéal, dans toute l'humanité, comme avant), ou bien nous trouvons un moyen d'arrêter de rêver définitivement.

    En plongeant au plus profond de notre inconscient.

    Au coeur du labyrinthe d'Irrgarten se tient la fontaine des enfants morts, et dans cette fontaine réside la Mer d'Argent et la Mer d'Argent est dans le coeur de chaque homme.

    Ceci est l'énigme du chat du labyrinthe.

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  5. Anonymous8:32 AM

    "la fontaine des enfants morts"
    je croyais que ce mythe sinistre était mort avec le reste - et je ne pense pas avoir envie de le ré-inventer.

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  6. Anonymous11:39 AM

    Tu es adepte des pléonasmes, inconnu du Chat. Irrgarten veut dire labyrinthe en allemand, alors pourquoi le labyrinthe du labyrinthe? A moins qu'il y ait un labyrinthe dans le le labyrinthe?

    Après tout, cela correspondrait bien à ce que je décrivais plus haut.

    Lawrence: je suis aussi aux alentours de Paris. Quels sont tes buts?

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  7. Anonymous8:04 PM

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